Le logo officiel Et quelques unes des équipes engagées: |
L'affaire des Intervilles
En 1974, pour le tennis professionel, les crises succèdent aux crises à une cadence infernale. Après la guerre ouverte entre la FILT et la WCT en 1972, le boycott de Wilmbledon en 1973, une nouvelle épreuve de force s’annonce avec la création des Intervilles, plus connue sous le nom de World Tennis Team (WTT), Cette épreuve par équipe lancée par des promoteurs privés avait de quoi étonner. Imaginée dès 1972 par Chuck Reichblum, un homme d'affaire de Pittsburg, et l'avocat Bill Sutton, les Intervilles avaient pour objectif de faire du tennis un grand sport populaire sur le contient nord-américain, comme le football américain, le base-ball ou le basket. Impressionné par le succès croissant du tennis depuis l’apparition des tournois open, Reichblum avait dans l'idée d'oganiser des rencontres de tennis par équipe dans des stades de 50.000 spectateurs, soit trois fois plus que les meilleurs assistances des finales de grand-chelem. La création de la NTL (Nationale Tennis League) fut officiellement annoncée à New-York en septembre 72, des licences étaient proposées aux investisseurs privés au prix de 250.000$.
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Quelques
mois plus tard en février 73, Larry King,(le mari de la Billy Jean)
et un groupe d'hommes d'affaire annoncèrent la création d'une
autre organisation sur le même principe de rencontres par équipe,
l'IPTL (International Professional Tennis League). Très vite, il
apparut qu'il n'y avait pas de place pour deux et avant d'en arriver à
d'inévitables actions judiciaires, les deux organismes fusionnèrent
sagement pour former la World Tennis Team. La WTT réussit rapidement
à vendre 16 licences à autant de grandes villes. New York,
Boston, Philadelphia, Baltimore, Detroit, Cleveland, Pittsburgh, et Toronto
formaient la "Eastern League", et Florida, Chicago, Houston, Denver, Minnesota,
Hawaii, Los Angeles, et San Francisco/Oakland la "Western League". Chaque
équipe devait jouer 44 matchs par saison.
Programme
d'une rencontre Philadelphie-Detroit avec
Billie Jean King, entraîneur-joueuse des Philadelphia Freedoms. |
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Rosewall et Evonne Goolagong, vedettes des Pitsburg Triangles
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Pour
assurer le succès populaire de l’entreprise, les organisateurs étaient
convaincus qu’il fallait faire évoluer les règles plutôt
rigides du tennis, déjà vieilles de cent ans. Pour attirer
un public moins connaisseur et avide de sensations fortes, les règles
du tennis furent modifiées. Voici quelques unes de ces nouvelles
règles :
- Jeux disputés en
7 points, comptage des points avec 1,2 3, (abandon des incompréhensibles
15,30 40...) et point décisif à tous les jeux (disparition
des avantages)
L'objectif avoué de ces inovations était de limiter la durée de chaque rencontre à 2h30 maximum, et de permettre au public d'oublier que le tennis était à la base un sport individuel. Si certaines de ces idées furent vite adoptées par tous, comme les balles en couleurs et les courts bicolores, d'autres furent considérées comme des hérésies et firent hurler les tenants de la tradition tennistique qui voyaient dans la coupe Davis et les tournois du grand chelem les seules épreuves dignes de ce nom. Pour beaucoup, ce n'était plus du tennis et les opposants par dérision n'hésitaient pas à parler "d'un nouveau jeu de balle". Curieusement, cette appelation fut reprise par les organisateurs qui l'utilisèrent sur un de leur logo : "WTT, a whole new ball game" |
Autre
sujet de friction, le calendrier, puisque les intervilles devaient se dérouler
de début mai à fin août. Les grands tournois Européens
étaient directement menacés. Les promoteurs avaient laissé
une petite place pour Wimbledon, mais laissaient libres leurs joueurs pour
les internationnaux de France et d'Italie. Menacée également
la coupe Davis puisque les joueurs participant aux intervilles se verraient
coincés en Amérique du Nord pour de longues périodes.
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Premier magazine officiel de la WTT, 1974, avec Newcombe en couverture. |
Pour
assurer le succès de l'entreprise, il fallait recruter quelques
uns des meilleurs joueurs du monde, et donc y mettre le prix. Avec la caution
de Billy Jean King, partie prenante dans l'entreprise, la plupart des joueuses
profesionnelles se laissèrent tenter par l'aventure et les grosses
sommes d'argent proposées. Newcombe, dès l'été
1973, annonça la signature de son contrat pour 50.000$, et sa participation
à Forest Hills (qu'il devait gagner) fut un instant compromise...
Newcombe fut vite rejoint par la plupart des anciennes gloires australiennes
trop heureux de s'offrir une fin de carrière dorée sans trop
se fatiguer: Rosewall, Laver, Stolle, Emerson et même le revenant
Tony Roche... La jeune génération américaine emmenée
par Jimmy Connors se laissa également facilement tentée,
ainsi les les australiens Alexander et Dent, et quelques autres..
Tout le monde ne céda pas aux appels des dollars facilement gagnés. La plupart des joueurs européens, attachés à leur fédération, à leurs tournois nationaux et à la coupe Davis, refusèrent de rejoindre la WTT. Le très influent Jack Kramer, président de l'ATP, se prononça également contre cette nouvelle organisation. Plus significatif, Arthur Ashe et Stan Smith se déclarèrent même ouvertement contre ce "nouveau jeu balle" qui risquait de tuer l'esprit du tennis. Il est intéressant de relire ce qu'ils en pensaient à l'époque : |
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Les
pays européens directement menacés par cette nouvelle initiative
des promoteurs privés entreprirent donc de défendre leurs
intérêts. La France et l'Italie notamment ne doutaient pas
que la liberté qui était laissée aux joueurs d'Intervilles
de participer à leurs tournoi ne durerait pas. La même crainte
animait tous les pays attachés à la coupe Davis. C'est pourquoi
un certain nombre de pays européens dont la France et l'Italie décidèrent
d'interdire leurs tournois à tous joueurs ayant signé avec
Intervilles.
Cette guerre ouverte, déclarée
et menée courageusement par Philippe Chatrier, nouveau président
de la Fédération Française de Tennis élu en
1973, devait durer 5 ans. Dirigeant courageux et inflexible, il commença
ainsi son long combat pour la renaissance de la coupe Davis et redonner
au tournoi de Roland-Garros un prestige et une notoriété
égals à celles de Wimbledon. Il devait gagner ce long combat:
sa victoire fut reconnue par ses pairs, il fut élu à l'unanimité
président de la Fédération Internationale en 1979.
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La première victime de cette "gueguerre" ridicule fut l'américain Jimmy Connors, interdit de Roland-Garros alors qu'il était sur la route d'un possible grand chelem en 1974. D'autres interdictions suivirent comme Ilie Nastase en 1976 et 1978, et Bjorn Borg en 77, tous deux coupables d'avoir cédé aux sirènes pleines de dollars des promoteurs d'Intervilles. Côté dames, ce fut pire encore et le tableau féminin de Roland-Garros fut sérieusement dégarni pendant toute la période que dura la WTT. Heureusement, cette compétition devait se terminer après la saison 1978 quand deux équipes se déclarèrent en faillite. Les promoteurs firent alors leurs comptes: l'affaire était déficitaire depuis le début, et le large public attendu n'avait jamais été au rendez-vous. Ils décidèrent qu'ils avaient perdu assez d'argent comme cela et mirent la clé sous la porte. |
Il est clair que l'histoire
des Intervilles n'a pas grand chose à voir avec l'histoire du tennis
et des tournois du grand chelem. Mais il était quand même
nécesssaire d'en rappeler les origines et les grand principes sur
lesquels cette épreuve s'était construite. La WTT a fait
peser une grave menace sur le tournoi de Roland-Garros pendant 5 ans, et
il fallut attendre la disparion des Intervilles en 1978 pour que les Internationaux
de France retrouvent définitivement leur prestige passé.
Mais qui se souvient aujourd'hui qu'en finale de la WTT 1974, les Denver Racquets triomphèrent des Philadelphia Freedoms par 55 à 48 ? |
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Dernière mise à jour : 10
avril 2010
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