.
6/ 1926 : Le dernier 
Wimbledon 
de Suzanne Lenglen







Épisode précèdent : 1919-1926 La "Divine"  Suzanne Lenglen

Épisode suivant : 1923, les débuts de la Wightman Cup

 

Suzanne Lengle salue 
la reine Mary
Wimbledon, 1926
.
Après un nouveau triplé à Paris en juin, Suzanne se rend à Wimbledon prête pour un septième succès qui ne semblait pas pouvoir lui échapper. Mais ce n’est plus alors la jeune fille gaie de ses débuts.  Au sommet depuis 6 ans, constamment sous pression et sollicitée par son entourage, elle est dans un état nerveux déplorable. Adorée par les uns, critiquée par les autres, elle est en permanence sous les feux de l’actualité. Bref, elle vit comme une star bien malgré elle et le supporte de moins en moins. Elle a de plus en plus souvent des crises d’insomnie, consulte fréquemment des médecins, prend des médicaments pour dormir… C’est dans ce contexte difficile que va se produire un incident qui va mettre fin à sa carrière…

Dernière finale des internationaux 
de France contre Miss Browne
1926.

Avec Elisabeth Ryan en double dames.
  Le mercredi de la première semaine, la reine Mary, qui adorait voir jouer Suzanne, manifeste auprès des organisateurs son désir de la voir jouer lors de sa visite du lendemain.  Le secrétaire du club change donc l’heure du match pour plaire à sa souveraine. 

Or Suzanne, en grande vedette quelle était devenue, avait pris l’habitude de se faire porter ses convocations directement par un courrier. Au moment où le changement d’horaire est décidé, elle avait déjà quitté le club et pris rendez-vous avec son médecin pour le lendemain. Le nouveau secrétaire, par ignorance des habitudes, à moins que ce ne soit par agacement contre cette petite française arrogante, n’envoie aucun message à Suzanne pour l’informer du changement d’horaire…

Et le lendemain, c’est le drame. Prévenue au denier moment, Suzanne Lenglen refuse de changer son rendez-vous chez son médecin. Quand elle se présente au club, c’est pour apprendre qu’elle a une demi-heure de retard et qu'elle est réclamée d'urgence sur le central. Suzanne, qui devait jouer également un double dames, refuse tout net de jouer deux matchs de suite. Le ton monte, les organisateurs s'énervent, la menace même de disqualification.  C’est alors une ambiance de folie qui s’abat sur Wimbledon ce jour là. La reine Mary, dans la tribune, attend devant un court central vide, les yeux cachés derrière des verres fumés pendant que Suzanne, réfugiée dans le vestiaire, fond en larmes et fait une crise de nerfs. Les organisateurs insistent, mais Suzanne refuse de sortir. En catastrophe, on va chercher Borotra qui est autorisé - exceptionnellement ! - à entrer dans le vestiaire des dames pour essayer de convaincre Suzanne de venir jouer, en vain. En désespoir de cause, le malheureux Borotra ira seul sur le central présenter les excuses de l’équipe de France auprès de la reine Mary! 
 

Avec Borotra,
son partenaire de 
mixte à Wimbledon
  Cependant, les palabres continuent et les bonnes volontés l’emportent. Les deux matchs de Suzanne sont reportés au vendredi. Le lendemain, le double dames peut avoir lieu, mais la pluie qui s'abat sur Wimbledon retarde encore le simple d'une journée. Tout le monde espère que l’incident est clos, mais le public anglais ne pardonne pas l’affront fait à sa souveraine par la petite française. Le samedi, Suzanne est accueillie dans une ambiance glaciale sur le central déserté par la reine. Elle gagne son match d’une manière expéditive, comme d’habitude, mais sort du court sans avoir entendu un murmure, ni un applaudissement…  La française est très affectée. Ce sera sa dernière apparition à Wimbledon. Le lendemain dimanche, jour de repos, Suzanne s’enferme dans sa chambre d’hôtel pour décider finalement de quitter le tournoi.
Cet incident dramatique et stupide marque la fin de la carrière amateur de Suzanne Lenglen. Elle accepte alors l’offre d’un promoteur américain et devient la vedette de ce qui sera la première tournée de tennis professionnelle à travers les Etats-Unis. C’est un nouvelle vie qui commence et la jeune fille espére bien trouver, par ce moyen, une nouvelle joie de vivre, la possibilité de jouer au tennis pour son plaisir, et peut-être enfin – pourquoi pas ? – rencontrer l’amour de sa vie. Mais c’est déjà une autre histoire…